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30 novembre 2011

Enterrement en petite pompe

A l’heure où j’écris ces lignes Henri aura été enterré, dix jours après sa mort. La levée du corps devait avoir lieu à 8h30, ce matin, à l’Hôpital Paul Brousse de Villejuif et l’enterrement devait avoir lieu dans la foulée, au cimetière des Pommiers, juste à côté.

Odette a été incapable de m’en dire plus.

Mardi, la semaine dernière, elle avait réussi à obtenir un rendez-vous avec l’employée de la Mairie en charge de ce type de dossiers, l’enterrement des gens n’ayant pas les moyens de payer des obsèques. D’après Odette, elle était en congés la semaine dernière et n’a donc pas pu la voir avant son retour, avant-hier.

10 jours…

Je suppose que Marcel et Patrice assisteront à la cérémonie. Si on peut appeler ça une cérémonie. Je ne sais même pas si quelqu’un fera un vague semblant de discours.

Mathieu, le patron de la Comète, sera peut-être là.

Pendant ces 10 jours, je n’ai pas réussi à faire bouger Odette pour accomplir les premières démarches administratives malgré l’aide d’Apolline que je tiens une nouvelle fois à remercier. Odette est d’origine Portugaise et, si j’ai bien compris, dans leurs traditions, on ne peut pas faire ces démarches avant les obsèques.

Pourtant, 10 jours, c’est le délai maximum pour déclarer la mort et obtenir le capital décès.

Je suppose qu’Odette est très mal conseillée. Les Portugais forment une communauté très forte dans ce quartier et un réflexe communautariste, je suppose, les poussent à se débrouiller entre eux, sans vraiment faire confiance aux « français de souche » (les guillemets sont de rigueur, Odette était peut-être en France avant ma naissance).

Elle aura perdu un capital décès qui lui aurait fait une grosse bouffée d’oxygène. J’ai tout fait pour l’aider, pour elle, mais, au fond, je dois reconnaître que je ne considère pas ce pognon comme un du, Henri ayant passé une partie de sa vie à vivre de brocante et de ferraille sans jamais rien déclarer…

Dès ce soir, je vais refaire un point avec elle, pour essayer de réparer les dégâts, qu’elle se mette bien en règle, fasse les papiers nécessaires, soit reconnue comme « concubine notoire » (je ne sais plus quel est le terme) et tout ça.

La famille d’Henri, sa femme (il était toujours marié bien qu’étant avec Odette depuis la nuit des temps), sa fille et son fils, si j’ai bien compris, qu’il ne voyait qu’occasionnellement (et non plus du tout comme je le croyais) n’a pas donné signe de vie. Odette les a appelés le jour de la mort puis lundi, quand elle a eu des précisions pour l’enterrement.

Rien. Aucune nouvelle, aucune instruction, sans doute pas de fleur.

Tiens ! Je n’ai même pas pensé aux fleurs. Généralement, quand il y a un décès dans une de mes bandes, les copains comptent sur moi mais, avec la mort de Jean-Louis, cet été, j’en ai eu marre. Je ne suis pas un gentil organisateur.

Juste un type qui boit un coup avec Odette quatre ou cinq fois par semaine, depuis deux ans qu’Henri était à l’hôpital.

Je suppose qu’elle va garder ses habitudes.

Si elle garde la maison.

(Photo)

26 février 2011

On va dire que ça va. Henri est sorti de l'hôpital.

C’est Odette qui me l’a dit à midi. Je vous ai déjà parlé d’Odette et Henri, il sont des « seconds rôles de ce blog », mais je me rappelle de ce billet du blog politique, en décembre 2009, c’était une des premières fois où je parlais dans ce blog politique de mes vagues relations avec des braves gens du Kremlin-Bicêtre où je me laisse aller une vague émotion alors que je ne veux que décrire une des facettes de la misère ordinaire.

Alors je vais résumer ce billet. Lui 65 ans, elle cinq de moins. Lui, ferrailleur à l’époque, elle au RMI. Il avait eu un vague accident l’empêchant de bosser donc se retrouvait sans la moindre ressource, à part une vague retraite. Seul le RMI d’Odette permettait de subvenir aux fins de mois. Alors je leur avais prêté 70 euros (je me rappelle du montant à cause du titre de mon billet « les 70 euros du bout du monde »). Ces 70 euros avaient semblé être pour eux une telle délivrance que ça m’avait marqué, j’avais éprouve le besoin de rappeler que, parfois, loin derrière nos claviers de blogueurs politiques, la misère était proche.

Depuis cette époque la santé d’Henri faisait des hauts et des bas. Le diabète, … Le mal du 21ème siècle si j’en crois les propos des toubibs suite à mon dernier déboire mécanique.

Il y a environ un mois, il était hospitalisé, dans un lointain hôpital des Yvelines. Odette n’a jamais été fichue de me donner le nom du patelin. Si j’en crois sa description, à vue de nez, c’est dans le coin de Saint Germain en Laye. On s’en fout. Trop loin pour qu’elle puisse aller le voir, elle qui n’est probablement jamais sortie du 94 autrement qu’en avion, au départ d’Orly, pour aller voir sa famille au Portugal.

Depuis, il lui ont coupé un à un les cinq doigts d’un pied. A raconter ça, après, c’est presque rigolo – trois mois de rééducation et il remarchera, pour peu que son diabète se stabilise – mais j’imagine leur torture, pendant ces dernières semaines, ne sachant pas ce qu’ils allaient devenir. Froidement, j’imaginais aussi les angoisses d’Odette, la retraite d’Henri payant les charges de la maison, à la mort d’Henri, Odette n’aurait eu qu’une solution : repartir au Portugal, dans sa famille, sans RMI pour se payer des Kir, vivant heureuse en attendant la mort. Une trentaine d’années si tout va bien.

Nous-mêmes étions à moitié torturés. Sans être des amis, c’étaient des personnages du décor, que nous voyions tous les midis, les samedis et dimanches, leur payant un coup à l’occasion et papotant cinq minutes. Dans le temps, on les voyait presque tous les soirs, jusqu’à ce qu’il commence à baisser. Pendant 10 ans. Alors on s’inquiétait. On n’avait des nouvelles que le soir, par l’intermédiaire du patron de la Comète quand il avait eu le temps de discuter avec Odette le midi, et des nouvelles à peine précises, le week-end, Odette étant incapable de nous décrire la maladie d’Henri.

Je ne vous parle même pas de mon état d'esprit : les toubibs pensant que j'avais du diabète (je vous rassure, c'était une fausse alerte), je m'imaginais comme Henri, les doigts coupés les uns après les autres. Pas très bon pour le moral...

Odette était contente, ce midi. Henri est rentré à la maison. Il arrive à marcher, un peu, de la cuisine à la chambre, en s’appuyant sur un machin, là tu sais, à moitié carré avec quatre pieds et une barre de chaque côté et devant pour s’appuyer, ah oui ! un déambulateur, oui, c’est ça.

Il y a dix huit mois, il était ferrailleur, trimbalant des tonnes de métaux, démontant des appartements, des bistros (le métal d’un comptoir récupéré vaut très cher), écumant les rues à la recherche d’encombrant jetés par les gens.

S’il n’arrive pas à bosser, d’ici quelques mois, il faudra qu’ils disent adieu à leur train-train, à leurs deux apéros du midi, voire trois ou quatre, le week-end, si Tonnégrande ou moi sommes dans le coin et de bonne humeur. Ils vivront alors cloîtrés dans leur petit pavillon pourri de banlieue, qu’ils ont réussi à acheter il y a trois ans, jusqu’à ce qu’ils soient expulsés à l’occasion de quelque opération immobilière, telles celles qu’on voit de plus en plus, le long de la Nationale 7, au nord de Villejuif.

Mais Odette est contente. Henri est rentré à la maison. Il arrive à faire quelques pas entre la cuisine et la chambre.

18 octobre 2010

Ca faisait longtemps que je ne m'étais pas fâché avec le vieux Jacques

Ca fait longtemps, aussi, que je ne vous avais pas donné de ses nouvelles. On est fâché irrémédiablement, je crois. Au moins 2 jours.

Ca a commencé à l’Aéro, vers 12h30. J’étais avec Corinne, sa mère et Michou. Voila le vieux qui se pointe accompagné de Manu Le Brésilien qui n’est pas plus Brésilien que vous et moi. Je les trouvais de très bonne humeur.

« Dis donc, le vieux ! T’es plein comme une huitre. » « Oui ! Mais j’ai commencé à 10h30, je ne suis pas des petits joueurs, comme vous ! »

Les deux ont continué à picoler et à discuter puis sont partis vers la Comète, à mon grand désespoir, n’ayant pas spécialement envie de bouffer avec deux types bourrés.

Vers 13h, je me pointe avec Michou à la Comète. Le vieux était seul, au comptoir. Nous lui avons suggéré de nous offrir un apéro. Odette et Henri se sont pointés.

La discussion est partie sur les retraites et les deux vieux réactionnaires, Henri et Jacques, ont commencé à ronchonner après les gens qui sont inconscients, cons, débiles, fainéants et j’en passe.

Les deux étant retraités et pris à 100% par la sécu pour leurs maladies respectives (sans compter tous les trucs dont ils ont bénéficié quand ils n’étaient pas encore à la retraite), je les ai trouvé gonflés et je les ai engueulés.

Le vieux : « Ah ! Mais tu veux toujours avoir raison, quand on parle politique, tu veux jamais discuter. » Non ! Je ne veux jamais discuter avec un vieux con bourré qui n’a strictement aucune culture politique à part que le Général était un grand bonhomme.

Alors je l’ai engueulé copieusement et il est parti fâché.

Et j’ai payé un verre à Odette et à Geneviève pour faire rager Henri. Ca a fait rigoler le patron.

17 février 2010

Des nouvelles du petit monde de la Comète

Le gros Henri est sorti de l'hôpital. Vous vous en foutez, je ne vous avais pas dit qu'il y était rentré. Une crise d'épilepsie qu'il nous avait faite, l'andouille.

Odette, sa grosse, est contente qu'il soit sorti. Visiblement, elle a arrosé ça une bonne partie de l'après-midi.

Voilà une photo, pour illustrer ce billet. C'est Johnny le clochard. Il vient de nous expliquer qu'il n'a plus le droit de bosser à cause de son casier. Il faut dire que zigouiller les autres clodos n'est pas autorisé par la loi. Du moins, c'est une rumeur qui circule dans le quartier.





-- Post From My iPhone dont au sujet duquel j'ai nettoyé l'objectif récemment. C'est mieux non ? D'ailleurs la Comete n'est pas que magique, elle est aussi photogénique.

Tiens ! C'est la première fois que je fais un billet aussi long du bistro. Ça me donne une soif terrible.

Ah ! Grodem vient d'arriver. Tonnégrande aussi. Aie.

12 janvier 2009

La gloire pour le gros Henri

Mon billet avec le Gros Henri est bien placé dans Cozop ! Cliquez pour qu'il soit en tête de la Une que je puisse l'imprimer et me foutre de sa gueule au bistro ce soir.

Le Gros Henri boit de l'eau

Pris en flagrant délit par notre reporter, Jim La Branlette.

02 janvier 2009

Premier janvier à Bicêtre

C’est à peu près ce que j’ai entendu dans la bouche d’Henri le Ferrailleur qui s’adressait à Marcel le Fiacre.

Marcel nous avait invité, en ce 1er janvier, à voire le champagne chez lui vers 18 heures. J’avais rendez-vous avec Jim et lui à l’Aéro pour qu’il nous amène chez lui. Il habite à 300 mètres mais avait insisté : il rentrait de Paris et c’était sur son chemin. Michou était à l’Aéro.

Il a alors appelé son épouse coincée avec (ou sans) une sciatique : « Chérie, j’arrive pour le champagne avec Jim, Michou et Nicolas », le reste de la bande n’était pas là. Son épouse, Miranda, aurait alors hurlé : « Ca va pas, non, déjà que je suis coincée, tu veux débarquer avec ta bande de potes dégénérés alors que nous sommes sortis de table il y a deux heures : non et tu as intérêt de te pointer en vitesse ».

Il est rentré deux heures après. Il a du se faire engueuler.

Entre temps, Henri le Ferrailleur et sa femme, Odette, se sont pointés, suivis par Djibril.

Henri s’est cassé la gueule sur le verglas mardi soir. Il a le bras droit paralysé. Il ne peut plus conduire et est obligé de picoler avec le bras gauche. Mardi soir, je l’avais engueulé : « va immédiatement aux urgences ». Le voir trainer deux jours après me remplissait de peine. Je lui ai donc dit : « Bon, va donc dès demain chez le toubib ». Il m’a répondu : « avec quels sous, mon frère ? ».

Henri vit au jour le jour. Il vend de la ferraille. Avec un bras en moyen, ce n’est pas facile. Il dit souvent qu’il ne gagne qu’une vingtaine d’euros par jour (mais avec sa femme il en dépense le double au bistro).

Pris de pitié, je voulais lui prêter 30 euros pour qu’il puisse payer le toubib. Finalement, son épouse a sorti un billet de 20 pour payer une nouvelle tournée. Je me suis dit que j’avais mieux à faire que de prêter des sous à ces braves gens

L’épouse en question s’était renversé la gamelle d’eau bouillante pour le riz sur la main et s’était ébouillantée. Ils faisaient tellement peine à voir que j’en étais plié de rire, avec les deux alcooliques acolytes restés sur place : Djibril et le vieux Joël qui nous racontait son réveillon, avec son épouse et sa belle mère.

Sa femme avait fait elle-même le foie gras et ils se faisaient une joie à l’idée de le déguster. Il ne parlait presque que de ça depuis que j’étais rentré à Bicêtre, samedi dernier. Du coup, il me raconte sa soirée « vite fait »… et un moment, je lui demande : « Et le foie gras ? ». « Ah ! Tu as remarqué ! On l’a oublié… ».