17 juin 2008

La Comète, version 2.0

Je dois avouer quelque chose. La nouvelle Comète au Kremlin-Bicêtre me déroute.

J’aimais l’ancienne, comme j’aime toutes ces brasseries désuètes, pleines de formica ou de bois, de moquette, de marbre, marquant une autre époque : celle des bougnats, ces patrons rapiats montés à Paris à 20 ans et créant une affaire à 30, dans les années 60 ou 70, en faisant des lieux hypermodernes pour remplacer les bouges de leurs parents. Ils remplaçaient l’affiche Dubonnet par un miroir et un tableau des tarifs réglementaire.

Ils sont maintenant tous à la retraite et leurs taules sont tenues par une génération intermédiaire, la génération des fils de bougnats ayant cru un peu vite à l’argent facile.

Je n’ai pas connu cette révolution des bistros et une nouvelle se produit sous mes yeux… La Comète a été refaite, entièrement. La terrasse a été cassée. Trop de boulot pour la refaire ? Nécessité de laisser des tables dehors pour les fumeurs ? Volonté de rétrécir le bar pour bouleverser l’ambiance ? Ou de donner une ambiance de grands boulevards ?

Dimanche soir, j’en avais parlé avec Mouloud, ancien patron des Monts d’Aubrac, magnifique petite brasserie prochainement remplacée par un Auchan, avenue de Fontainebleau, au Kremlin-Bicêtre. Elle datait de cette époque. Le vieux Jean (un autre !) l’avait vendu à Brahim et Mouloud il y a une petite dizaine d’année. Son fils ne pouvait pas la reprendre.

Brahim et Mouloud sont parti il y a bientôt deux ans pour acheter une brasserie de la génération suivante (les années 90 ?), le Saint-Louis, à Choisy-le-Roi.

La génération postérieure de bistros (le début des années 2000) me plaisait bien. J’étais tombé sur quelques uns de ces grands espaces dépouillés, vêtus de bois clair, que je finissais par rechercher au cours de mes déplacements professionnels, pour éviter de passer mes soirées dans des hôtels de chaîne, réservés par la secrétaire d’un client répondant à des consignes de services « achats », à la recherche d’économies débiles.

Mouloud habite toujours Bicêtre et je le croise de temps. Sinon, je vais boire à Choisy. Dimanche, à l’Aéro, en face de la Comète nous devisions de choses et d’autres… dont de l’Evénement à Bicêtre : ce nouveau bistro qui doit ouvrir dans deux jours (aujourd’hui, donc).

Je parlais de mes doutes à Mouloud. Dimanche, nous n’avions que peu d’information, mais je pressentais une augmentation substantielle des tarifs et était inquiet de la suppression de la terrasse couverte. La terrasse « dehors » serait orientée plein nord, le long de la Nationale 7 et, trois jours par semaine, au cœur du marché. Que voulez-vous que les gens y fassent alors que l’Avenue Eugène Thomas regorge de terrasses plaisantes plein sud, égayées d’accortes serveuses (j’espère que Michel ne lit pas mon blog).

Nous savions aussi par Jim que le restaurant serait ouvert le soir (il l’était déjà il y a une quinzaine d’années mais ils avaient arrêté, faute de clients) et ça me réjouissait. Enfin un potentiel lieu de vie nocturne à Bicêtre !

Néanmoins, je doutais… Je connais mes voisins. Pas du style à aller bouffer le soir.

Pour la qualité de la restauration, je n’avais pas de doute, de même que je n’en ai pas eu pour les précédents patrons, Patricia et Patrick. La formule de Jean – entrée-plat-dessert à 10 euros – était morte. Les clients sont des rapiats qui en veulent toujours plus, mais le tarif allait devoir prochainement dépasser les 11 euros… Les cantines d’entreprise et sandwicheries continuant à se développer, les concurrencer deviendrait impossible. Une seule solution : la montée en gamme.

Le problème, et je le vois bien avec mes potes qui mangent souvent dans le quartier (les retraités, donc), est que les clients n’aiment pas les changements. Peut-être le double changement de patrons sera-t-il salvateur ?

Pour la bouffe, j’ai confiance. C’est le reste qui m’inquiète. Qui m’inquiète ? C’est un bien grand mot, c’est juste que j’aime bien ce bistro… mais il n’est plus lui-même. Et il y en a d'autres. Toujours est-il qu’ils arrêtent les petits verres de vin et de Kir… Connaissant les clients, je doutais…

La Comète marchait bien avec ces cafés à 1€60 en terrasse et ses petits verres à 1€20 au comptoir.

Mouloud m’a alors répondu : « Ne t’inquiète pas, ce sont des pros, ils savent ce qu’ils font, ça va marcher ». Mouloud étant lui-même un pro, je lui fais confiance. En fait, clairement, la cible de clientèle n’est plus la même. C’est le problème des nouveaux patrons, Mouloud a confiance. Moi, je connais la clientèle du quartier… Les habitués, ceux qui ont fait la gloire de la Comète, ne sont plus la cible.

Hier soir, je gare ma voiture et, en allant à l’Aéro, je constate que le tableau des tarifs est affiché.

Demi et Ricard au comptoir : 2€50 (contre 2€20 avant et 2€ à l’Aéro et à l’Amandine).
Café en terrasse : 2€10. S’il me lit, Patrick, l’ancien patron, ne doit pas en croire ses yeux… Lui qui se faisait engueuler par les clients avec le café à 1€20 au comptoir.

J’étais fumasse. Terminés, mes soirées ou mes apéros là-bas avec mes potes. D’ailleurs, grand hasard, ils étaient tous à l’Aéro hier soir. Corinne, sa mère, Carlos, Djibril, Tonnegrande, Michou, le vieux Jacques, Camille, … 15 euros la tournée !

Comptez-bien ! Dans le bistro en face, c’est plus cher, et il n’y a plus de petits verres… 25 euros… Ce n’est plus jouable. Terminé. Parmi les clients des bistros de Bicêtre, à la Comète, il n’y aura plus que les plus fortunés et les casse-couilles qui prennent leur café le matin bénissant la politique du gouvernement…

Ce matin, c’était l’ouverture. Je me décide à aller à prendre un café avant de sauter joyeusement dans ma voiture pour entamer une journée de travail vivifiante.

J’ai découvert un nouveau bistro. Une page s’est tournée. C’est vachement bien. Un truc moderne avec des clins d’œil au passé. L’affiche Dubonnet ressortie, mais pas comme ses affiches ringardes que l’ont voit parfois, comme un vrai élément du décor.

On verra ce soir pour l’inauguration… Et si Mouloud avait raison ?

Je vais pisser autour du comptoir pour marquer mon territoire. Avant Tonnegrande et Djibrill pour moins souffrir de la comparaison.

(photo de la nouvelle serveuse).

14 commentaires:

  1. Nonobstant les prix, le bistrot à l'air sympa ...
    De toutes façons, je serais étonné que les prix des autres bistrots n'augmentent pas ...

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  2. ben si en même temps la serveuse vaut bien le demi à 2€50

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  3. Elmone,

    Certains vont augmenter mais pas tous.

    Marc et Didier,

    Bof. Ca dépend de la quantité de bière bue...

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  4. Non, non : ça dépend de la serveuse, j'insiste !

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  5. Non. Je ne suis pas d'accord. Je vais proposer une autre solution. On met un droit d'entrée à 10 euros et on fait payer en suite 2 euros la bière.

    Comme ça à partir de 20, la serveuse accorte n'est plus un coût supplémentaire (ni un coup supplémentaire, d'ailleurs, après 20 bières).

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  6. Note à moi-même : ne pas oublier l'appareil photo lors de la visite commentée de la Comète.
    Et le carnet de note même.

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  7. Et n'oublie pas de me prévenir de ta présence, la mienne risque de s'espacer.

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  8. Ca fait une sacrée inflation en peu de temps tout ça !
    Il est clair qu'ils souhaitent changer la clientèle et donc vous poussent dehors par les tarifs mais ont-ils bien penser à vérifier qu'il y a une autre clientèle possible ?
    :-))

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  9. Poireau,

    Je crois que non... Mais d'un autre côté, c'est le long terme qu'il faut viser et le quartier est en pleine mutation.

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  10. Ca confirme ce que j'ai ressenti le soir de l'ouverture. Il était évident que le nouveau patron n'était pas ravi de voir les "anciens". Il s'est un peu détendu sur la fin mais quand même, il nous a tout bonnement ignorés.
    Dommage, j'aimais bien la Comète. mais sans Monsieur Jean, de toute façon, ce n'était déjà plus pareil.
    Et l'Aéro, franchement, c'est pas très confortable ...

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  11. Fiso,

    Non ! La mayonnaise commence à prendre. Je t'expliquerai...

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  12. « La mayonnaise commence à prendre » :

    j'espère au moins qu'ils la servent à part...

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