13 mai 2013

Raymond

Hier, j’ai mis la photo de Raymond sur le blog sans parler plus longuement de cet individu qui mérite pourtant mieux qu’un hommage funèbre d’autant qu’il n’est pas visiblement pas mort contrairement à ce que je croyais plus ou moins. Je pense que ça fait six ou sept ans que je ne l’ai pas vu et près de 10 que nous n’avons pas papoté.  Il m'a dit hier qu'il traînait plus souvent sur Versailles, avec son épouse, où habite sa leur fille. C'est étrange. J'ignorais qu'il avait une fille et une femme. Je suppose qu'à l'époque où je l'ai connu, semi-clochard, ils étaient en froid. Je n'ai posé aucune question.

Raymond « était » un ivrogne britannique qui donnait des cours d’anglais à des jeunes Chinoises dans la salle du fond, à la Comète, tous les mardis soirs. A la fin de ses cours, vers 20 heures, il nous rejoignait au comptoir. On le voyait parfois d’autres jours.

Si j’avais eu mon blog à cette époque, il en aurait été un des personnages centraux. Il m’était presque sorti du crâne mais j’y pensais parfois, me demandant ce qu’il était devenu. En fait, il avait cessé ses cours, faute d’étudiantes, puis arrêté progressivement de venir à la Comète. Je suppose qu’il n’avait pas de pognon. Sur la fin, on le voyait un peu errer dans le quartier mais semblant se cacher. Je le croisais sur la place piétonne entre chez moi et la Comète ou dans le métro mais jamais au bistro ou dans la rue. Comme le patron de la Comète ne le voyait jamais passer, je suppose qu’il dormait dans un des recoins de cette place et prenait la station de métro plus loin, comme s’il se cachait de nous.

Hier, il est rentré dans le bistro, comme si on s’était vus la veille, ne se rendant même pas compte de la surprise qu’il pouvait me provoquer. Je l’ai pris dans mes bras car j’étais réellement heureux de le voir. C’était bizarre : je ne suis pas coutumier de ces gestes d’affection. C’est toute une partie de ma vie qui m’est revenue en mémoire, cette période d’avant 2002 ou 2003 (l’époque où j’ai connu Tonnégrande, le vieux Jacques et où Jim est arrivé à la Comète).

Pourtant, il faut être honnête. Je ne pouvais pas le blairer. Plus exactement, je l’aimais bien mais je n’aimais pas les moments passés avec lui. Son accent anglais était horripilant et bien que vivant en France, il se revendiquait différent. Ou, plutôt, il s’étonnait toujours des habitudes que l’on pouvait avoir, comme si on devait s’adapter à ses propres coutumes. Dès qu’on disait un truc, il répondait avec des phrases du genre : « ah vous les Français… » La photo d’hier était mauvaise mais Raymond avait un pif énorme. C’était une espèce de caricature d’ivrogne puant. D’ailleurs, par moment, il puait réellement.

Je disais qu’à la fin, je soupçonnais qu’il était SDF mais dans la première partie de notre copinage de comptoir, il habitait dans Paris, je ne sais plus où. Je pense qu’il squattait chez quelqu’un mais qu’il ne pouvait pas y aller toutes les nuits. Il dormait donc quelque part ailleurs… où il n’avait pas les moyens de se laver. Je crois d’ailleurs me rappeler qu’il faisait parfois sa toilette, le matin, à la Comète…

Pourtant, il était un peu comme une mascotte. Il nous rejoignait alors que le bar était fermé et que nous connaissions ses moments d’intimité, si particulier, que j’essaie de décrire parfois ici. Les clients de la salle sont partis. Le patron est détendu et n’a plus qu’à attendre le moment où le serveur a fini le ménage puis à décider quand il va virer les andouilles au comptoir.

2 commentaires:

  1. Tu es un indécrottable sentimental, mon Nico !
    (et malgré la photo un peu flou (tu avais bu ?), on voit bien qu'il a un tarin surdimensionné)

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